Un texte signé Nassim Ben Allal

Canada - 1980 - William Fruet
Titres alternatifs : Funeral Home
Interprètes : Kay Hawtrey, Lesleh Donaldson, Barry Morse, Dean Garbett

retrospective

Le cri des ténèbres

1980. Alors que Sean S. Cunnigham préparait un petit film se déroulant au bord d’un lac et qui allait pulvériser le box-office, un réalisateur canadien propose un autre film, louchant assez souvent sur VENDREDI 13 (le lieu de l’action et son atmosphère) mais également sur le PSYCHOSE de tonton Alfred. Remarqué quatre ans plus tôt avec le rape and revenge HOUSE BY THE LAKE (connu aussi sous le titre de DEATH WEEKEND), Fruet propose en cette début de décennie une sorte de pré-slasher aux relents à la fois « campy » et surnaturels.
Heather, une jeune fille de 18 ans, va passer l’été chez Maude, sa grand-mère qu’elle n’a pas revu depuis de nombreuses années. Maude, veuve depuis quelques temps déjà, profite de l’occasion pour transformer sa maison proche d’un lac (un funérarium du temps de son mariage), en chambres d’hôtes. Et alors que les clients commencent à arriver, certains disparaissent et d’autres sont assassinés. Y’a-t-il un lien, comme le vient à soupçonner Heather, entre ces crimes et la mystérieuse personne avec laquelle sa grand-mère semble s’entretenir tous les soirs à la cave ?
La toute première valeur de ce film est archéologique : LE CRI DES TENEBRES est l’exemple type du film d’horreur nord-américain de la fin des années soixante-dix. Loin de toute surenchère et autre effets de style malvenus, le filmage s’avère assez naturaliste dans le sens où il cherche avant tout à servir son histoire portée par des personnages qu’il prend le temps de développer. Si très vite, l’ambiance en vient à baigner dans une certaine morbidité et qu’une forme de climat trouble teinté de fantastique s’installe (grâce, notamment, à un terrifiant chat noir et à un excellent personnage « d’idiot du village »), William Fruet ménage ses effets et fait monter crescendo un suspens dont le point d’orgue, le premier « meurtre » n’arrive qu’au bout d’une bonne demi-heure de métrage. En faisant la part belle à ses personnages, cadrés comme les éléments clés d’un récit qui aborde surtout des problématiques humaines (la solitude, la morale et la folie) le réalisateur et son scénaristes développent une véritable empathie pour leurs personnages principaux, empathie qui fera augmenter l’adrénaline du spectateur lors des scènes-chocs.
Si celle-ci ne sont pas nombreuses, exceptée le fabuleux climax et sa poursuite dans les couloirs du sous-sol du funérarium, elle sont autant de flashs stupéfiants qui clouent littéralement le spectateur à son fauteuil. Sans concessions et avec une bande son aiguisée, les meurtres sont éprouvant sans pour autant être gore. Saupoudrée d’une romance entre l’héroïne et un ancien camarade de jeu, l’intrigue ne faiblit pas car tous les clichés sont évités. Renforcée par une intrigue secondaire qui fini par la rejoindre, l’histoire débouche sur un monument de fureur grâce à un twist habilement amené qui, s’il n’est pas vraiment novateur, s’inscrit dans la directe et efficace lignée des quatre-vingt neufs minutes qui précédent.
Témoignage historique et véritable plaisir d’amateur éclairé, LE CRI DES TENEBRES annonce de bien belle façon une décennie de boogeymen et s’impose comme l’un des films de transition entre les dérives horrifiques découlant des suspens hitchcockiens et les slasher qui ne tarderont pas à arriver.


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- Article rédigé par : Nassim Ben Allal

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