Un texte signé Sophie Schweitzer

France - 2017 - Éric Valette
Interprètes : Tomer Sisley, Terence Yin, Pascal Greggory, Stéphane Debac

BIFFF 2017review

Le serpent aux mille coupures

Dans le sud ouest de la France, un fugitif blessé pénètre comme un chien dans un jeu de quilles au milieu du fragile équilibre entre la violence des narcotrafiquants et des racistes locaux. De son apparition aussi mystérieuse que sa disparition découlera une vague de violence qui va se propager sous les yeux inquiets du chef de la gendarmerie locale.

Eric Valette s’est fait connaître par la réalisation de MALÉFIQUE avec Clovis Cornillac, puis repéré par Hollywood qui lui a confié le remake de LA MORT EN LIGNE intitulé ONE MISSED CALL. Il travaille également à la télévision sur BRAQUO, LE TRANSPORTEUR mais aussi la méconnue mais très intéressante SABLE NOIR. Avec LE SERPENT AUX MILLE COUPURES, il s’attaque au roman noir en adaptant le roman éponyme de DOA, auteur français ayant également été scénariste sur Braquo.

Roman noir, LE SERPENT AUX MILLE COUPURES s’impose comme un polar français de qualité, mais pas que. De par son méchant, un métis aux origines asiatiques, il offre une atmosphère très moite et dangereuse proche du polar asiatique. Les méthodes du tueur mêlant traditions asiatiques et la culture de la terreur et de la cruauté des cartels donne un étrange mélange qui n’est pas sans rappeler la première saison de True Detective où l’inspiration du tueur appelait toute une mythologie effrayante.

La mythologie asiatique n’est pas la seule atmosphère convoquée. Le film fait aussi partie de ces films français qui choisissent de s’installer dans la campagne française, délaissant la trop souvent mise en scène région parisienne. Par ses personnages aux traits marqués, par le racisme ambiant, la méfiance, la violence sous-jacente, LE SERPENT AUX MILLE COULEURS convoque une atmosphère assez étrange, très latine (pas uniquement du fait de l’ombre des cartels ou de la mafia) mais aussi très française.

LA PROCHAINE FOIS JE VISERAI LE CŒUR, LES PREMIERS ET LES DERNIERS ou encore MANGE TES MORTS TU NE DIRAS POINT, autant de films français qui parviennent à mêler habilement une France rurale, en marge de la société moderne et connectée, peu présente sur les écrans et qui pourtant existe. Le mélange entre la rudesse de ces territoires et le film noir est souvent une réussite comme en témoigne LE SERPENT AUX MILLE COUPURES.

Le film repose également sur un soin particulier apporté à l’esthétique, souvent portée sur la semi obscurité, des clairs obscurs, et des tonalités verdâtres qui ne sont pas sans rappeler l’éclairage de SEVEN ou encore du SILENCE DES AGNEAUX. Des références qui paraissent évidentes au vu des scènes gores du film, rares mais d’autant plus violentes pour le spectateur non averti. C’est ce déferlement de violence qui rend le film d’autant plus fort. La violence fait voler en éclat les non-dits, et la tension qui saisit le spectateur pendant tout le film, et culmine avant un climax aussi libérateur que violent servant de véritable catharsis.

Enfin, on soulignera la musique, véritablement envoûtante, ainsi que la prestation très perturbante et angoissante de Terence Yin qui indéniablement fait rentrer son personnage dans le panthéon des psychopathes cinématographiques.


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- Article rédigé par : Sophie Schweitzer

- Ses films préférés : Le bon, La brute et le Truand, Suspiria, Mulholland Drive, Les yeux sans visage, L'au-delà


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