Un texte signé Jérôme Pottier

USA - 1977 - Al Adamson
Interprètes : Jim Kelly, Bill Roy, Roberto Contreras, Marilyn Joi, Biff Yeager, Essie Lin Chia, Charles Grant, Cowboy Lang, Little Tokyo

retrospective

Black Samuraï

En 1973, le monde découvre, ébahi, un artiste martial noir exceptionnel nommé Jim Kelly dans une série B d’action non moins exceptionnelle : OPERATION DRAGON. L’Afro Jim Kelly, remarqué par le rôle-titre du film, Bruce Lee, car il est élève de son école (dans laquelle sévit également un certain James Coburn), est intégré au casting de cet actionner barré (mis en musique avec talent par Lalo Schifrin) signé Robert Clouse. Le metteur en scène de LES RATS ATTAQUENT (1982), impressionné par la prestation de Jim Kelly lui offre la vedette de BLACK BELT JONES (1974). La pelloche, bien qu’inférieure à ENTER THE DRAGON, est un pur délire poseur bourré de scènes hallucinantes (ah cette baston à la station de lavage !), toutefois, Jim Kelly n’arrive pas à s’imposer en star « mainstream ». Il tourne alors une série de films honorables dont THREE THE HARD WAY (1974) sous la direction du réalisateur de SUPERFLY (1972) : Gordon Parks Jr ; LA CHEVAUCHEE TERRIBLE (1975) un western du metteur en scène de ET LE VENT APPORTA LA VIOLENCE (1970) : Antonio Margheriti ; il retrouve son mentor Robert Clouse pour le moyen LES 7 AIGUILLES D’OR (1974) qui signe le début du déclin de « black belt Jim ». En 1976 Jim tourne sous la direction d’un des pires tâcherons d’Hollywood, Al Adamson, un film qui sortira l’année suivante sous le titre BLACK SAMURAÏ…
Jim Kelly y interprète Sanders, un agent spécial de l’organisation D.R.A.G.O.N. (mais où vont-ils chercher tout cela ?), un maître des arts martiaux plein aux as, qui plaît aux femmes, a une belle voiture de sport pleine de gadgets et dont le nom de code est BLACK SAMURAÏ. Mais un richissime sorcier vaudou « big boss » de la dope dénommé Janicot (l’inénarrable Bill Roy) ordonne à son équipe de mercenaires menée par Chavez (interprété par Roberto Contreras le sosie latino de Lee Van Cleef-le talent en moins !) de kidnapper Tokie Konuma (Essie Lin Chia aperçue en 1969 dans le sublimissime LE BRAS DE LA VENGEANCE de Chang Cheh), fille d’un ministre hongkongais qui a déclaré la guerre aux narcotrafiquants. Les inconscients viennent d’enlever, ni plus ni moins, que la régulière du samouraï noir qui décide d’aller tous les éclater !!!
Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il y parvient aisément, détruisant tout sur son passage et surprenant plus d’une fois ses adversaires abasourdis. Ainsi, à un nain provocateur qui lui dit, flingue à la main, « tu ne vas pas plus vite que les balles », il ne répond rien, se contente d’aller plus vite que les bastos, puis le tue. Ce nain mort est le premier d’une longue liste, ça tourne à l’obsession chez Adamson (véritable fan de freaks, comme le prouve sa filmographie riche en monstres) qui en balance à la face de Jim Kelly pendant tout le métrage. Ce n’est d’ailleurs pas vraiment politiquement correct de nous montrer des nains se faire démantibuler à base de low-kicks, pas plus que les nombreuses allusions homophobes, enfin si Al Adamson était intelligent, ça se saurait ! Voir à ce sujet l’ennemi sur lequel s’acharne le plus Jim, un noir gay prénommé Bone (Charles Grant) à qui il brise la colonne vertébrale. L’homosexualité ayant toujours été un grand tabou pour la communauté noire étasunienne, d’où la création du sensationnel personnage d’Omar le barge (joué par le balafré Michael K. Williams) par George Pelecanos et David Simon dans la série télé THE WIRE (2002-2008).
Heureusement BLACK SAMURAÏ est sauvé par une sorte de folie complètement Bis qui voit chacun de ses défauts amplifiés dans le bon sens du terme. Ce dont se souviendront très bien Scott Sanders (tiens tiens un nom d’agent du D.R.A.G.O.N.) et Michael Jai White (qui s’appellera Bone pour les besoins du bourrin BLOOD & BONE de Ben Ramsey-2009) lorsqu’ils créeront le personnage foutrement jouissif de BLACK DYNAMITE (2009). Adamson arrive à nous recaser un nombre incalculable de fois les mêmes plans, à titre d’exemple la scène où la strip-teaseuse enlève deux fois sa culotte dans la même minute vaut son pesant d’or. Les poursuites en voiture sont filmées avec les pieds mais voir Jim balancer des missiles par les pneus ou tchatcher avec son énorme téléphone pour ne rien dire sont des moments d’anthologie, le mieux restant les scènes d’action si mal réalisées que l’on voit que les coups ne sont pas portés. Quant aux bastons face aux nains et aux africains en pagne (ouais ça se passe en Amérique, mais Adamson s’en fout), voire contre un vautour, elles sont autant de plaisirs coupables pour tout amateur de Bis qui se respecte. Le summum est atteint à l’approche du final lorsque Jim utilise un propulseur digne de Sean Connery dans JAMAIS PLUS JAMAIS (Irvin Kerschner-1983) pour s’envoler dans le ciel. Cette séquence impressionnante a du bouffer tout le budget de cette série B (la meilleure de son auteur généralement plus proche du Z). Rien que pour revoir Jim Kelly, le beau karatéka noir le plus frimeur de l’histoire du cinéma (il avoue dans cette bobine être plus fort que Mohamed Ali) enchaîner bourre-pif et autres coups de tatane pendant 1H20, la vision de ce rigolo BLACK SAMURAÏ s’impose.


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- Article rédigé par : Jérôme Pottier

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