Un texte signé Vincent Trajan

Mexique - 1953 - Chano Urueta
Titres alternatifs : The Monster
Interprètes : Miroslava Stern, Carlos Navarro, José María Linares-Rivas, Fernando Wagner, Alberto Mariscal

Dossierretrospective

El Monstruo Resucitado

En 1953, après plus d’une cinquantaine de films à son actif, le réalisateur Chano Urueta décide de se tourner vers le cinéma horrifique initié 20 ans auparavant par Juan Bustillo Oro (DOS MONJES et EL FANTASMA DEL CONVENTO en 1934) avec EL MONSTRUO RESUCITADO dans lequel l’homme a fait appel à la belle Miroslava Stern (LA VIE CRIMINELLE D’ARCHIBALD DE LA CRUZ de Luis Buñuel) et à José Maria Linares Rivas, un acteur espagnol émigré au Mexique suite à la guerre civile qui a eu son heure de gloire dans les années 30 au travers de pellicules comme LA DOLOROSA Y DESTINO DE MUJER (1934), MADRID SE DIVORCIA (1935) ou bien CENTINELA ALERTA ! en 1937.

Visiblement très influencé par l’univers horrifique des studios Universal, Chano Urueta prend d’entrée de jeu le parti de lier EL MONSTRUO RESUCITADO à des œuvres majeures comme LE FANTÔME DE L’OPERA de 1925 et le FRANKESTEIN de James Whale.
En effet, dans la première partie de son film, la rencontre de Nora et du mystérieux Herman Ling est plus ou moins calquée sur la relation paradoxale qui unissait d’Erik et Christine (Lon Chaney / Mary Phiblin) dans le film de Rupert Julian.
Ainsi, la jeune journaliste va apprendre à connaître Herman Ling et comprendre peu à peu sa détresse du fait de sa différence physique (il a été rejeté par sa propre famille, mais aussi par ses collègues de travail). Malgré tout le dégoût que Nora a elle-même pour l’aspect physique d’Herman, la belle est irrésistiblement attirée par le génie de cet homme et mue par la pitié à son égard, tout en étant effrayée par ses idées radicales à l’égard du genre humain…
Chano Urueta met parfaitement en valeur l’ambivalence des sentiments de Nora et d’Herman (il tombe amoureux de la journaliste) grâce à une ambiance gothique bien maîtrisée (le manoir aux miroirs brisés, les statues de cire qui rappellent THE MYSTERY OF THE WAX MUSEUM de 1933…) qui trouvera son point d’orgue lors de la fameuse scène de la découverte du visage d’Herman à la manière de celle du FANTÔME DE L’OPERA.

Après s’être senti berné par l’ambition journalistique de sa dulcinée, l’homme défiguré va littéralement changer son état d’esprit et transformer sa colère en vengeance. C’est à partir de ce moment là, qu’Urueta abandonne l’univers romantico-horrifique du FANTÔME DE L’OPERA pour se cantonner à celui de FRANKENSTEIN.
Aidé par Mischa, son âme damnée (une sorte d’Igor), Herman Ling décide de redonner la vie à un jeune suicidé Sergueil Rostov (Carlos Navarro) à la manière du Dr. Frankenstein, afin de prendre possession de son cerveau et de lui donner des ordres à distance pour tuer des femmes ressemblant à Nora.
Avec une seconde partie de film plus tournée vers l’action, le réalisateur s’en donne à cœur-joie en alternant les scènes de violence (les meurtres d’Ariel) et la dégénérescence de la conscience d’Herman Ling qui sombre peu à peu dans la folie meurtrière. L’aspect physique de l’homme est aussi repoussant que son esprit. Le monstre est né et il s’accepte lui-même comme tel !

Même s’il emprunte beaucoup au cinéma américain, EL MONSTRUO RESUCITADO possède une personnalité indéniable et une superbe ambiance qu’on croirait issu des années 20 ou 30.
Et au-delà de son approche désuète avec pas loin de soixante ans de recul, il s’avère être une série B bien sympathique au final et une belle photographie du début de cinéma de genre au Mexique dans les 50’s. Le film se pose sans conteste comme l’un des éléments moteurs du cinéma horrifique de ce pays puisque de nombreux autres œuvres comme LA BRUJA (1954), LADRON DE CADAVRES (1956), EL VAMPIRO (1957) ou EL BARON DEL TERROR (1961) viendront faire les beaux jours du cinéma Mexicain.


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- Article rédigé par : Vincent Trajan

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