Un texte signé Franck Boulègue

Italie / Afrique du Sud / Espagne / Royaume-Uni - 2006 - Lamberto Bava
Interprètes : Laura Harring, John Hannah, Pete Postlethwaite, Coralina Cataldi-Tassoni, Mosa Kaiser...

review

Ghost Son

GHOST SON, le dernier film à ce jour de Lamberto Bava (le réalisateur de DEMONS), s’avère tout à la fois éminement satisfaisant et cruellement décevant. Satisfaisant car joliment filmé, plutôt bien joué dans l’ensemble et assez bien maîtrisé. Décevant car dénué pour bonne part de cette touche de folie baroque qui fait habituellement le charme des « B-Movies » italiens. Il faut dire qu’il s’agit ici d’une coproduction internationale, et que le film a été tourné en Afrique du Sud avec une brochette d’acteurs anglo-saxons – ceci pouvant expliquer cela.

Les vingt premières minutes du film relèvent ainsi davantage de la bluette sentimentale que du film « gore » avec étalage de trippes et de viscères. Stacey et Mark coulent le parfait amour dans leur ranch sud-africain, à l’écart de la civilisation, entourés de leur élevage de chevaux. Bava enchaîne les séquences feutrées au sein de cet univers idyllique – fait de jaunes, de verts et de tout un ensemble de tons fort agréables – que rien ne semble pouvoir déranger. Bien entendu, il s’agit ici d’établir un équilibre qui sera rompu par la suite afin d’enclencher le mécanisme de la narration. Il n’en reste pas moins qu’on s’ennuie ferme durant cette première portion du récit, qui se concentre essentiellement sur la plastique « pneumatique » de Laura Harring (la Rita de MULHOLLAND DRIVE, Miss USA 1985), régulièrement dénudée. Bref : tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, et Stacey jure à Mark qu’elle ne pourrait vivre sans lui. Dont acte.

Survient alors l’incident qui déclenche tout : Mark se tue au volant de sa jeep (dans une belle ligne droite sans obstacles apparents !), laissant sa compagne seule au beau milieu de cette demeure où tout lui rappelle sa présence. Bientôt, des apparitions fantômatiques de son ex-amant semblent pousser Stacey au suicide. Elle est d’ailleurs bien près d’y parvenir. Mais le plus surprenant est encore à venir. Quelques temps après le décès de Mark, Stacey découvre qu’elle attend un enfant de lui, qu’elle nommera Martin. Or Martin va rapidement s’avérer pour le moins étrange, l’esprit de son père le possédant afin d’amener Stacey à le rejoindre dans l’outremonde. Il s’agit maintenant pour elle d’honorer sa promesse de jadis, en dépit du fait qu’elle n’est plus si convaincue que ça de son bienfondé…

Alors bien sûr, quelques touches distillées de-ci de-là nous indiquent clairement que nous sommes indubitablement ici en présence d’un long-métrage italien : un jet de vomi verdâtre digne de L’EXORCISTE qui vient frapper le visage de Stacey, l’érection qui affecte son nouveau né alors qu’elle prend une douche avec lui, des failles dans le script qu’aucun studio américain ne laisserait jamais passer… Pourtant, malgré ces éclairs dionysiaques, GHOST SON se révèle résolument trop propre sur lui pour jamais vraiment nous convaincre. Encore une fois, on ne saurait reprocher à ce film de faire montre d’amateurisme. Mais c’est justement ce caractère propret qui nuit au final à l’ensemble. Peu de séquences dérangeantes, une ambiance insuffisamment pesante, des clichés éculés… Une manque d’originalité et de folie qui nuit à l’intérêt qu’un tel récit pourrait susciter chez l’amateur type de « giallos » et autres créations subversives transalpines. Dommage, car tous les ingrédients étaient pourtant présents pour une de ces productions joyeusement chaotiques dont Lamberto a le secret. Le fait de tourner en dehors de la péninsule italienne ne lui réussit apparemment pas. Peut-être devrait-il se concentrer sur ce qu’il sait faire le mieux – i.e. le « gore » et les « giallos » – et laisser ce type de récits à d’autres réalisateurs, plus à l’aise que lui dans le domaine de l’horreur psychologique en milieu naturel.

Pour résumer le paradoxe que constitue GHOST SON : un assez bon film qui nous laisse pourtant franchement sur notre faim. Foin de plans léchés et de circonvolutions sentimentales à l’eau de rose ! Oui aux séquences sanguinolentes et aux personnages creux !


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- Article rédigé par : Franck Boulègue

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