Un texte signé André Cote

USA - 2007 - Martin Weisz
Titres alternatifs : The Hills Have Eyes 2
Interprètes : Michael McMillian, Jessica Stroup, Daniella Alonso, Jacob Vargas, Lee Thompson Young

retrospective

La Colline a des yeux 2

Quelques années après les événements du premier LA COLLINE A DES YEUX, un groupe d’adolescents doit traverser le même désert pour pouvoir participer à une compétition de moto-cross. Très vite, ils deviennent les victimes des survivants de la famille de cannibales du volet antécédent.
Après le succès du film précédent devenu culte pour beaucoup, Wes Craven donne une suite, seulement une année après avoir donné vie au célèbre croque-mitaine de Elm Street.
On s’étonne ainsi que le scénario et l’ambiance du métrage lorgnent plus volontiers du côté de la concurrence de Freddy (Jason Voorhes pour ne pas le nommer) que vers le serial killer aux gants griffus. La raison : les croque-mitaines de LA COLLINE n’ont pas le même pouvoir évocateur que le tueur des cauchemars. Alors que Freddy incarnait les dangers des rêves (idée géniale au demeurant) on découvre une dimension allégorique supplémentaire : les vices d’une communauté fermant les yeux pour sauver les apparences, vivant donc dans une illusion, un rêve éveillé. L’une des raisons pour lesquelles Freddy est immortel provient de l’incapacité symbolique des parents à communiquer avec leurs enfants devenus adolescents alors que ceux-ci cherchent à s’émanciper de l’autorité parentale sans pouvoir quitter le domicile familial. Les mutants de LA COLLINE incarnent eux l’image d’un passé renié par les survivants eux-mêmes et non plus par leur entourage. Le film débute par la séance de psy d’un des survivants du premier volet, il n’est ainsi pas surprenant d’assister à des flashbacks venant de tous les protagonistes du premier volet. Certains peuvent même friser le ridicule : parmi eux, le chien.
Cette thématique du souvenir renié et du traumatisme est sous-jacente dans les slashers et l’on comprend pourquoi Craven y a longtemps oeuvré, toute sa filmo tournant autour du thème du secret à garder. On est toutefois sceptique sur la forme. En effet, le film a la même structure narrative qu’un VENDREDI 13 : scènes de présentation des personnages, arrivée sur les lieux, intervention du tueur, lutte entre les personnages devenues proies et le tueur. L’ambiance est d’autant plus proche que les deux sagas partagent le même compositeur : Harry Manfredini. On n’est donc plus étonné de reconnaître les mêmes mélodies ou plutôt le même genre de musique. Manfredini n’utilise pas les mêmes thèmes musicaux bien entendu, mais plutôt des instruments et des sons identiques qui créent une ambiance similaire entre LA COLLINE A DES YEUX et VENDREDI 13.
Toutefois, des idées intéressantes surnagent. Ainsi, le flashback du chien s’avère finalement pertinent. En effet, on le considère ainsi comme un personnage à part entière et non un simple accessoire « Deux Ex Machina » servant à sauver un protagoniste en mauvaise posture. On note aussi la fille aveugle qui découvre le cadavre de ses amies. Cette scène aurait été l’occasion d’un parti pris visuel original source de thrillers tels que BLINK (une aveugle venant de retrouver la vue est le témoin d’un meurtre) ou TEMOIN MUET (une muette témoin d’un cambriolage et qui ne peut pas appeler à l’aide) dans lesquels l’handicap des protagonistes engendre des scènes de suspense. Craven choisit de filmer cela comme un slasher classique alors que la particularité du personnage aurait pu lui suggérer des effets visuels plus innovants avec l’utilisation d’une caméra subjective mettant en scène la vision de ce personnage aveugle. Néanmoins, il est savoureux de souligner l’aspect parodique de ce dernier. Lors de la scène où elle fuit le tueur, on se remémore toutes les autres demoiselles en détresse vues dans maints slashers. Force est de constater que la fille aveugle semble avoir les mêmes difficultés que ses homologues à repérer les divers outils nécessaires à sa lutte et sa fuite. Ou plutôt, les personnages des autres films semblent avoir les mêmes difficultés qu’elle. Serait-ce un private joke ironique de Craven envers les autres slashers ? Pourquoi ces personnages ont autant de mal lors de cette scène ? C’est parce qu’elles sont « aveugles », pardi.
Donc, l’un des problèmes de ce film provient de ses caractéristiques techniques qui lui procurent dorénavant un air de « voyage dans le temps » ramenant le spectateur contemporain à une époque où les slashers comme VENDREDI 13 sortaient avec succès en salles.
L’autre problème est son interprétation. Tous les acteurs surjouent les adolescents insouciants, ce qui est aussi une constante dans le slasher de cette époque. Par exemple, au moment où le groupe décide de finalement prendre le raccourci, on note une insouciance particulièrement énervante en raison de son manque de crédibilité : on a du mal à croire à leur enthousiasme pour traverser un territoire source d’une telle légende sanguinolente. Il est d’ailleurs difficile d’assimiler le contexte de tension provenant de leur désir d’arriver à temps à leur compétition, raison pour laquelle ils prennent le raccourci. On comprend qu’il y a un changement d’horaire (entre hiver et été) qui n’a pas été observé à la préparation de leur itinéraire puisqu’un personnage le mentionne mais en règle générale, toutes ces indications sont tournées platement : scène en plan américain et non serré qui aurait souligné l’importance de ces détails.
Le film donne l’impression d’une série B filmée sans conviction, même si on peut noter ici et là plusieurs idées qui ne sont jamais développées en dépit de leur potentiel. Cependant, il est difficile de renier le plaisir nostalgique que l’on prend au visionnage de LA COLLINE A DES YEUX 2 en raison de tous les tics visuels et narratifs de son époque qu’il contient. Néanmoins, il n’est pas conseillé de le regarder en tant que classique du genre. On risquerait de tomber de haut. A voir comme une curiosité pour mieux appréhender le cinéma de son auteur.


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- Article rédigé par : André Cote

- Ses films préférés : Dark City, Le Sixième Sens, Le Crime Farpait, Spider-Man 3, Ed Wood

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