L’Art de la guerre (2000) – Derrière le miroir
Dans L’Art de la guerre, Wesley Snipes incarne Neil Shaw, un espion qui travaille pour les Nations Unies. Lors d’une mission de surveillance, l’agent est accusé d’avoir assassiné l’ambassadeur de Chine.
L’art de travailler avec Wesley Snipes
Au début des années 2000, Wesley Snipes est à l’apogée de sa carrière grâce au succès de Blade. Souhaitant incarner un espion, il produit L’Art de la guerre. Pour mettre en images le film, l’acteur choisit Christian Duguay, un ancien Opérateur caméra, devenu réalisateur de séries B dont les plus gros succès sont les suites de Scanners. La production de L’Art de la guerre doit se faire rapidement, ce qui au départ ne doit pas poser problème au réalisateur canadien réputé pour travailler rapidement et efficacement. Malheureusement, les disputes entre Snipes et Duguay rendent le tournage difficile et nuisent au résultat final : Le film connaît un échec commercial.
Un témoignage de son époque
L’Art de la guerre est un bel exemple des films d’action de la fin des années 90. Il a pour but de mettre en avant son héros, de le montrer aux yeux du public comme invincible, mystérieux et parfait. Cette description convient bien à Wesley Snipes. L’acteur adore rappeler sa supériorité et son intelligence au point de tomber dans l’excès. Il en devient souvent ridicule, notamment dans une scène où son personnage surjoue en réagissant à l’agression d’une de ses collègues. Cette scène ajoutée à des flash-backs sur une musique tragique provoque le sourire chez le spectateur.
Bien que certains tropes aient mal vieilli, dans l’ensemble, cette plongée dans le passé est plutôt agréable. La réalisation brute et toujours en mouvement de Christian Duguay est assez efficace. Hormis les séquences qui glorifient le personnage principal, le film est rythmé et fluide. Le public prend plaisir à suivre les aventures de l’agent Shaw. Duguay utilise fréquemment la steadycam pour placer le spectateur au cœur de l’action.
Il tient généralement lui-même la caméra, mettant à profit son expérience pour aller droit au but. Malgré les interférences dues aux exigences de Wesley Snipes, le metteur en scène parvient à tirer son épingle du jeu et à proposer un peu plus de profondeur au scénario que la simple histoire d’un espion cherchant à prouver son innocence.
Sous surveillance
La mise en scène de Duguay ajoute une dimension supplémentaire à L’art de la guerre. Dès le début du film, le réalisateur explique que le monde change et qu’il ne faut pas se fier aux apparences. Il utilise souvent des écrans pour poser le contexte politique : la Chine, nouvelle grande puissance, inquiète les États-Unis. Duguay place également ses personnages face à des fenêtres et des miroirs, pour illustrer que ce nouveau siècle est celui de la surveillance.
Chaque personnage est traqué par une caméra toujours en mouvement qui ne rate rien. Un climat de paranoïa plane sur le film, Shaw ne peut faire confiance à personne, tout le monde ment et ses certitudes volent en éclats comme les miroirs brisés qui parsèment le long métrage.
Le film dépeint une nouvelle guerre froide, une bataille voyeuriste et mensongère orchestrée par les médias et la politique. Christian Duguay apporte ainsi une réflexion intéressante et tristement prophétique que l’on retrouve dans les productions post 11 septembre.
L’Art de la guerre est une capsule temporelle du début des années 2000, témoin d’un monde et d’un cinéma d’action en pleine transformation qui rendent le culte de la star musclée ridicule. Malgré tout, ce long métrage reste très divertissant et offre un plaisir empreint de nostalgie qu’il serait dommage de manquer.