Un texte signé Yannik Vanesse

Italie, France, Espagne - 1964 - Marino Girolami
Titres alternatifs : Il piombo e la carne
Interprètes : Rod Cameron, Patricia Viterbo, Ennio Girolami

retrospective

Les Sentiers de la haine

Les Indiens n’ont plus que leur bois sacré, le reste de leur splendeur ayant disparu au profit de l’homme blanc. Cependant, le fils du chef, Chata, est surtout intéressé par Mabel Masters, dont il est amoureux. Si les sentiments sont réciproques, elle appartient hélas à une famille d’industriels sans scrupule qui ne rêve que de tabasser des Indiens et de leur voler leurs arbres pour pouvoir les vendre au chemin de fer.

Marino Girolami réalise et co-scénarise ce western au milieu des années soixante. Grand adepte du cinéma d’exploitation, il fut un réalisateur prolifique qui toucha entre-autre aux zombies (ZOMBI HOLOCAUST) ou au docteur Jeckyll (IL MIO AMICO JECKYLL).

L’ambiance année soixante des SENTIERS DE LA HAINE est perceptible dès les premières minutes. Le héros, Chata (incarné par Bruno Piergentili), ressemble plus à un hippie qu’à un Indien, avec sa belle coiffure et surtout sa veste en cuir avec des fleurs dessinées dessus. Sorti de cela, le film, à petit budget, essaie de nous raconter une histoire très inspirée par Roméo et Juliette, le fils et la fille de deux clans ennemis étant amoureux, alors que leurs parents ne pensent qu’à se faire la guerre. La mère de Chata s’apitoie ainsi sur le passé, quand l’Indien était tout puissant, et quand son mari était un valeureux chef de guerre, avant que l’alcool ne le détruise. Et les Masters haïssent les Indiens, le père de famille ayant transmis cette haine à ses fils du fait d’une sombre histoire de trahison. Mais il s’est aussi enferré dans une tractation qu’il ne peut honorer qu’en sacrifiant le bois sacré, et n’hésite pas, pour gagner du temps, à presque prostituer sa fille avec l’industriel avec qui il a signé ce contrat.
Ainsi, les personnages se révèlent assez mal construits. Chata a quelques fulgurances durant lesquels il défend ses frères, mais change rapidement d’avis, ne pensant finalement qu’à son amoureuse, le final étant à ce titre édifiant. Le patriarche Masters pourrait se révéler comme un très intéressant méchant tragique, n’arrivant pas à aller au-delà de sa souffrance et voulant protéger ses enfants, mais sa manière d’utiliser sa fille pour parvenir à ses fins gâche tout cela et le renvoie à son statut basique de mauvais. Et la charmante Mabel aurait pu être un rayon de soleil et de tendresse, la femme forte pour qui tout le monde se sacrifie, si elle ne jouait pas la girouette à tout bout de champs, trahissant d’abord son amoureux, puis son père, pour changer encore d’avis. Dans tout cela, seuls l’ami un peu fou du héros, et l’ancien shérif honnêtes et justes seront constants dans leur construction – mais hélas très peu présents.
LES SENTIERS DE LA HAINE sont nantis de nombreux dialogues effroyablement mièvres, et le scénario tient mal la route, les plans diaboliques des Masters étant assez mal construits et amenant à des scènes assez bizarres et difficilement compréhensibles. Les quelques fusillades du film, cependant, se révèlent plutôt honnêtes, même si elles sont un peu longues.
Le film est historiquement intéressant, puisque voir un western franco-italo-espagnol, bien loin des westerns spaghettis ou des films américains des années cinquante, mais plutôt complètement ancré dans la culture hippie, mérite qu’on s’y attarde. Cependant, malgré d’indéniables qualités, LES SENTIERS DE LA HAINE ne resteront pas dans les mémoires.


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- Article rédigé par : Yannik Vanesse

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