Un texte signé Yannik Vanesse

Espagne - 2001 - Carlos Ruis Zafon
Titres alternatifs : La Sombra Del Viento

Dossierretrospective

L’Ombre Du Vent

Daniel est un petit garçon quand son père l’emmène en un lieu étrange de Barcelone, le cimetière des livres oubliés. En cet endroit, Daniel doit choisir un livre (mais n’est-ce pas l’ouvrage qui le choisira ?) et le chérir comme un bien précieux. L’enfant se saisit de « L’ombre du vent », écrit par Julian Carax. En attaquant, ce soir là, la lecture de cet ouvrage, il ne se doute pas un seul instant que le mystère qui entoure son auteur va l’accaparer, l’obséder. Il ne peut s’imaginer que la route qui le mènera vers l’âge adulte le conduira tout autant vers la compréhension de ce que représente « L’ombre du vent » et de ce qu’a vécu Julian Carax.

L’auteur de ce livre (qui porte le même nom que l’ouvrage si important pour Daniel Sempere) est Carlos Ruiz Zafon. Ce dernier, après une carrière dans la publicité, s’est consacré à la littérature et « L’ombre du vent » est son quatrième roman, et le premier pour adultes.

Carlos Ruiz Zafon offre ici une oeuvre très dense mais pourtant aisément compréhensible, grâce à un style fluide qui plonge immédiatement le lecteur dans l’histoire. « L’ombre du vent », de par sa densité, peut ainsi difficilement être rangé dans une catégorie précise. Tout d’abord, il s’agit d’un roman historique. En effet, couvrant la période 1945-1956, il conte des moments très durs de l’Espagne, vue par les yeux de cet enfant qui grandit doucement alors que son pays souffre. Et Carlos Zafon parvient très bien à faire ressortir la cruauté de l’époque (certaines scènes sont d’une grande barbarie) tout en restant collé à son narrateur. Car, bien que n’ayant pas vécu à cette époque, l’auteur décrit magnifiquement comment un enfant aurait pu percevoir tout cela. De même, il sait très bien faire grandir cet enfant dans cette période horriblement trouble. « L’ombre du vent » est aussi une histoire d’amour sublime, triste, désespérée (le livre est très sombre) et un conte initiatique. En effet, Daniel, en courant après Julian Carax et ce qu’il est devenu, va suivre une route diablement similaire à l’étrange auteur, et cette enquête, cette course contre le temps et la destinée, va en grande partie forger l’adulte qu’il deviendra. Mais « L’ombre du vent » est aussi par moment quasiment un ouvrage fantastique. Avec cet onirisme souvent présent, ces mystères, ou encore cet effrayant personnage qu’est Lain Coubert (un homme sinistre décidé à rayer toute trace de Julian Carax de la surface de la terre), le roman flirte souvent avec le surnaturel.
Certaines choses sont prévisibles, comme par exemple l’identité véritable de Lain Coubert. Mais ce n’est pas le plus important. Les personnages sont attachants (le narrateur est tellement humain qu’il est difficile de ne pas s’identifier à lui), le style des plus agréables à lire, et l’histoire passionnante. On vibre ainsi au gré des pages, entre humour (certains personnages sont on ne peut plus pittoresques et nombre de dialogues sont irrésistibles), horreur (Fumero, chef de la police criminelle, est un monstre abominable) et mystère. On manque de verser une larme à de nombreuses reprises tant, parfois, le sort s’acharne, et on prie pour une fin heureuse. Bref, ce livre se vit complètement. Il ne s’agit pas de ce genre d’ouvrage qu’on lit d’un oeil, qui nous fait passer un bon moment mais qu’on oublie le lendemain. « L’ombre du vent » nous projette dans les méandres de son histoire au côté de Daniel, et nous le vivons, le ressentons, de la première à la dernière page.


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- Article rédigé par : Yannik Vanesse

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