Un texte signé Franck Boulègue

Japon - 2005 - Jun’ichi Yamamoto & Yudai Yamaguchi
Interprètes : Issei Takahashi, Aoba Kawai, Kenichi Kawasaki, Shôichirô Masumoto, Toru Tezuka…

asian-scans

Meatball Machine

Ce film à l’esthétique franchement « cyberpunk » est en réalité le remake d’un court-métrage du même titre réalisé en 1999 par Jun’ici Yamamoto. Ainsi, ce qui ne constituait au départ qu’un simple hommage au mythique TETSUO de Shinya Tsukamoto (1989) s’est métamorphosé, par la grâce d’un budget plus conséquent, en une œuvre à part entière, avec son ton et ses préoccupations propres. MEATBALL MACHINE est cependant loin de pouvoir rivaliser avec son modèle des années 80, autrement plus créatif et dérangeant : n’est pas Tsukamoto qui veut… Il n’en reste pas moins que sa vision procure quelques moments plutôt réussis, en dépit d’un scénario fort linéaire, quand la folie du propos se fait palpable à travers le jeu volontiers excessif des acteurs.

Yôji, employé timide et renfermé sur lui-même, travaille dans une usine qui jouxte celle d’une jeune femme, Sachiko, elle aussi inhibée, dont il ne tarde pas à tomber amoureux. Alors que leur relation semble tranquillement s’acheminer sur la voie qu’il désire, tout se détraque sans prévenir. L’étrange cosse métallique qu’il avait récupérée quelques temps auparavant dans une décharge publique prend soudainement vie et se jette sur l’élue de son cœur. Elle la transforme alors en ersatz de « Robocop », cyborg à la carapace métallique qui n’est pas sans faire penser à l’exosquelette des insectes. Il s’agit en vérité d’un « nécroborg », une entité parasite venue des étoiles, qui prend le contrôle des êtres sur lesquels elle se greffe afin de les jeter les uns contre les autres dans une suite de combats n’ayant pour seule issue que la mort. Le « jeu » auquel se livrent ainsi les minuscules extraterrestres aux commandes de ces monstres de chair et d’acier se déroule à l’insu de tous dans les rues du pays, et n’épargne ni femmes ni enfants.

Il va rapidement apparaître évident à Yôji que la seule façon de délivrer Sachiko de la malédiction qui s’est abattue sur elle va consister à lui ôter la vie. Sa propre contamination partielle par un autre nécroborg va l’aider dans sa traque qui débouchera, comme il se doit, sur un duel des plus spectaculaires…

On retrouve dans ce film la même énergie destructrice, héritée du manga, que l’on pouvait déjà voir dans TETSUO. Le corps des personnage s’enrobe progressivement d’excroissances métalliques, contondantes et acérées, qui traduisent visuellement la rage dévastatrice qui les anime. Ils se défont ainsi peu à peu de leur humanité pour se métamorphoser en créatures obnubilées par le combat meurtrier qui les oppose les unes aux autres. Le sang gicle haut, les chairs sont broyées, les perdants dévorés.

Ce qui éloigne cependant ce long-métrage de son modèle, c’est l’accent placé ici sur la relation sentimentale qui unit Yôji et Sachiko. Ce qu’il y a de tragique dans ce récit, c’est que Yôji n’a d’autre issue que de trucider sa bien-aimée pour l’aider à s’échapper de la situation dans laquelle elle est retenue prisonnière. Seule la mort pourra mettre un terme à ses souffrances. Il faut bien dire, de toute façon, que son corps est déjà irrémédiablement endommagé par l’étreinte contre-nature, le véritable viol que lui a infligé le nécroborg. Aucune possibilité de retour en arrière, donc.

Une volonté d’épaississement romantique de l’intrigue est donc ici décelable. On aurait toutefois apprécié que les auteurs creusent un peu plus le scénario de ce film qui, en l’état, bien que visuellement plutôt réussi, ne va pas beaucoup plus loin qu’un long affrontement entre cyborgs beuglants et gesticulants. De ce fait, MEATBALL MACHINE, s’il n’est pas foncièrement déplaisant, ne laisse pas au final un souvenir impérissable.


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- Article rédigé par : Franck Boulègue

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