Bel Ami
George Duroy travaille en tant que journaliste pour une revue à tendance conservatrice, défendant la morale et les institutions avec beaucoup de véhémence. La trentaine bien sonnée, très élégant, Duroy est pourtant quelqu’un de terriblement guindé, coincé, et aussi maladroit avec les femmes que pourrait l’être un jeune collégien. Sa vie affective va basculer le jour où il est chargé, par son employeur, d’écrire un papier lapidaire sur une exposition d’art érotique dans un musée de Stockholm. Il va rencontrer, sur place, l’éditeur en chef du magazine pour hommes « Playhouse », un certain Charles Forrestier. Mais il va surtout faire la connaissance, en très peu de temps, de plusieurs jeunes femmes, toutes plus ravissantes les unes que les autres. D’abord Clothilde, la secrétaire de Forrestier, puis Anita, un top model, et enfin Suzanne, la fille du grand patron des éditions Playhouse. Commence alors un jeu de la séduction qui va peu à peu transformer George Duroy en véritable playboy. Le journaliste maladroit va se découvrir en effet des talents d’amant insoupçonnés, qui auront des répercussions autant dans sa vie privée que dans le cadre de sa profession.
Le Suédois Mac Ahlberg s’est fait essentiellement un nom dans le cinéma en tant que directeur de la photographie. Sous cette étiquette, il a travaillé durant trois décennies (les années 1980 à 2000) avec quelques grands noms du cinéma de genre, parmi lesquels Charles Band et Stuart Gordon, mais aussi avec des pointures comme John Landis (INNOCENT BLOOD) et Renny Harlin (PRISON).
C’est oublier qu’à partir des années 1960, Mac Ahlberg réalisa quelques bluettes érotiques avant d’amorcer un virage au milieu des années 1970, notamment grâce à sa rencontre avec la jolie Marie Forsa, actrice révélée par Joe Sarno dans LES VIERGES DES MESSES NOIRES.
Le duo Ahlberg/Forsa va engendrer quelques classiques du cinéma érotique, à partir de 1974, avec tout d’abord FLOSSIE, puis JUSTINE & JULIETTE, BEL AMI et enfin MOLLY. Il est à noter que ces diverses œuvres, à l’instar des films danois de Werner Hedman de la même époque, témoignent de la fusion réussie entre l’érotisme et la pornographie. D’une scène à l’autre, en effet, on peut constater une alternance entre des actes sexuels simulés ou non. L’une des raisons se trouve dans le choix du casting. Dans BEL AMI, par exemple, on retrouve des actrices qui n’ont jamais fait de hardcore, comme Marie Forsa (elle est doublée dans les scènes montrant des gros plans), Christa Linder (LE DERNIER JOUR DE LA COLERE) et Jacqueline Laurent (LE JOURNAL INTIME D’UNE NYMPHOMANE, LES POSSEDEES DU DIABLE). Et on a aussi des actrices expérimentées dans le X, notamment Anne Bie Warburg, qui se fit remarquer dans quelques chefs d’œuvre du X avec son mari, Bent Warburg, parmi lesquels LA FOIRE AUX SEXES, LES LECONS DE CAROLLA ou encore LES BELLES DAMES DU TEMPS JADIS.
Du roman de Guy de Maupassant publié en 1885, Mac Ahlberg n’a bien sûr conservé que peu de choses : le nom des personnages principaux (plus ou moins modifiés), l’ascension sociale du héros, l’influence des femmes et le monde de la presse. Au cinéma et à la télévision, l’œuvre de l’écrivain a connu pas loin d’une quinzaine d’adaptations, la première dès 1919. Evidemment, Mac Ahlberg a pris pas mal de liberté par rapport au roman, d’autant plus que l’ouvrage de Guy de Maupassant n’a pas une teneur érotique.
Coproduit avec la France, BEL AMI possède de ce fait, dans son casting, deux acteurs français : Jacqueline Laurent, héroïne de deux films de Jess Franco mentionnés plus haut, mais vue aussi dans LA BONZESSE et NATHALIE RESCAPEE DE L’ENFER ; et André Chazel, acteur au parcours atypique, homme de théâtre, de télévision et de cinéma classique, qui effectuera en parallèle une carrière dans les circuits érotique et pornographique.
La star du film est évidemment Harry Reems, l’un des acteurs les plus connus du cinéma X américain, révélé dans une multitude d’œuvres référentielles dans le genre : GORGE PROFONDE, THE DEVIL IN MISS JONES ou encore FORCED ENTRY. Il se montre particulièrement à l’aise, comme à son habitude, et ce n’est guère étonnant, car Harry Reems fit preuve, durant toute sa carrière, d’une spontanéité peu commune, autant dans les scènes de sexe que dans le jeu proprement dit. Il est à noter que Reems avait déjà joué avec Marie Forsa l’année précédente, dans JUSTINE & JULIETTE et BUTTERFLIES. Durant les années 70, pas mal d’acteurs américains issus du X se sont illustrés en Europe : Eric Edwards retrouva Harry Reems en Scandinavie, John Holmes et Jamie Gillis eurent quant à eux l’occasion de tourner en France.
BEL AMI, sans vraiment faire preuve d’originalité, n’en demeure pas moins l’une des réussites du hard scandinave de l’époque, et même si le meilleur cinéaste, dans le genre, reste sans aucun doute le Danois Werner Hedman, Mac Ahlberg a pu exprimer toute l’étendue de son talent, durant cette époque, dans l’exercice de la comédie érotique.
