Un texte signé Patryck Ficini

Italie - 1972 - Michele Lupo
Titres alternatifs : Amico stammi lontano almeno un palmo
Interprètes : Giuliano Gemma, George Eastman, Vittorio Congia, Giacomo Rossi Stuart

retrospective

Ben et Charlie

Ben (Giuliano Gemma) et Charlie (George Eastman) sont deux losers désargentés qui s’entendent comme chien et chat. Leurs coups échouent lamentablement jusqu’à ce qu’ils décident de s’associer avec 3 bandits … ce qui ne leur réussira guère mieux !
Le bon Michel Lupo emploie Giuliano Gemma, Mr « Dents Blanches » en personne, 6 ans après le super ARIZONA COLT et 5 ans avant le quasi chef d’œuvre ADIOS CALIFORNIA. Leur association se solde ici par un produit nettement moins ambitieux et réussi, même si le réalisateur fait preuve une nouvelle fois d’un indéniable professionnalisme. Lupo, même dans un produit aussi mineur, a toujours le sens du cadre travaillé et du style spaghetti. Une telle constance dans l’efficacité fait plaisir à voir. Avec lui, on est loin de la mise en scène un peu molle, lâche, de certains westerns parodiques (puisque BEN ET CHARLIE en fait partie). Michele Lupo n’a jamais fait partie des maîtres du bis italien (trop peu de grands films à son actif, sans doute) mais il fut incontestablement un sacré conteur d’histoires. C’est déjà beaucoup !
BEN ET CHARLIE appartient donc à la vague des westerns-comédies post-TRINITA. Suite au succès du couple impayable Terence Hill/Bud Spencer, il met en scène un tandem comique de la même eau : un beau gosse crasseux et combinard (Gemma/Hill) face à un balèze grincheux qui ne le porte pas dans son coeur (Eastman/Spencer), avec quelques (rares ici) bagarres à mains nues. Gemma, toutes dents dehors et blond/roux (!), s’y connaît pour jouer un personnage sympathique. Il s’acquitte une fois de plus bien de sa tâche, avec parfois même une émotion dans le regard qu’on chercherait vainement chez le Terence Hill trinitesque. George Eastman, habituellement héros (DJANGO LE TACITURNE, LE DERNIER TUEUR) ou méchant (DJANGO PREPARE TON CERCUEIL) dans le western sérieux, incarne avec Charlie un personnage tout d’un bloc qui, contrairement au gai luron Gemma, fait la gueule en permanence. Ce qui est vraiment dans l’esprit Bud Spencer. Celui qui sera plus tard l’ANTROPOPHAGOUS en personne (Joe d’Amato est d’ailleurs chargé de la photo de BEN ET CHARLIE !) cosigne ici un scénario bien faible, pour le moins avare en gags amusants et à l’intrigue extrêmement légère. Il se rattrapera par la suite avec celui du chef d’oeuvre KEOMA. Si les deux héros sont très sympathiques (ce qu’on est au minimum en droit d’attendre d’une comédie de ce type), il faut bien reconnaître qu’il leur arrive des mésaventures peu excitantes ou innovantes. Se succèdent ainsi : triche aux cartes, bonne scène de hold-up et de poursuite, disputes fréquentes (amusantes sans plus). Seul point intéressant : BEN ET CHARLIE ne choisit jamais la voie du gros comique (ce qui explique aussi qu’on y rit si peu !), lui préférant le ton d’une comédie d’aventures. Ce choix narratif permet d’incorporer à l’intrigue 3 vrais bad guys aux sales trognes (dont ce cher Nello Pazzafini !) avec lesquels nos truands commettent l’insigne erreur de s’acoquiner. Ces bad guys, au moment inévitable de la trahison, tuent froidement le petit employé de banque qui s’était lié d’amitié avec Gemma. Cela nous vaut une scène relativement émouvante et une excellente fusillade (le métier de Lupo, toujours) où Ben et Charlie le vengent en descendant à leur tour les assassins. On a donc droit à un peu de cadavres et de western 1er degré à la fin d’une comédie bien trop timorée en délires et en drôlerie. Rien à signaler non plus quant à la musique : Gianni Ferrio est rarement inspiré.
Les amateurs de jolies femmes auront la satisfaction de croiser le beau regard de Marisa Mell, une belle fille malgré des traits un peu lourds. On l’admirera avec plus de plaisir tant elle est sexy dans PERVERSION STORY de Lucio Fulci ou dans le culte DANGER DIABOLIK. Dans BEN ET CHARLIE, elle ne fait vraiment que passer et on se demande bien ce qu’elle fabrique là. Elle aussi, sans doute !


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- Article rédigé par : Patryck Ficini

- Ses films préférés : Django, Keoma, Goldfinger, Frayeurs, L’Au-delà

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