Un texte signé Patryck Ficini

Italie - 1980 - Anthony M. Dawson, Antonio Margheriti
Titres alternatifs : L’ultimo cacciatore, The Last Hunter
Interprètes : David Warbeck , Tisa Farrow, Tony King

retrospective

Héros d’Apocalypse

Pendant la guerre du Viet-Nam, un petit commando américain accompagné d’une reporter traverse les lignes Vietcong pour permettre la destruction d’un émetteur qui transmet des appels à la désertion aux troupes des Etats-Unis…
Certains, comme Mad Movies, ont évoqué ce célèbre film de guerre italien à propos du quatrième Rambo, pour ses excès de violence. On a même parlé de gore à son propos. A la vision de ce Dawson, on ne peut que le comprendre tant le réalisateur va loin dans la représentation graphique de la violence et de la mort. Coups de feu sanglants en pleine poire, jambe arrachée (on voit l’os !), corps éventré les tripes à l’air, soldats jetés en pâture aux rats, tentative de viol (par les « gentils », les Américains), oeil crevé en gros plan, gunfight entre Américains (déserteurs contre « héros », des gars qui auraient en d’autres circonstances fait la fête ensemble, histoire de montrer combien la guerre est une belle saloperie)… Les soldats, d’un camp comme de l’autre, tombent comme des mouches, l’action brutale est extrêmement soutenue et ne s’arrête guère…
On dirait qu’avec cette série B explosive (au budget sûrement bien inférieur à ce qu’il semble, talent oblige !), le parfois très bon Antonio Margheriti a voulu livrer son opinion sur la guerre, qui ne peut être que crade, bestiale et impitoyable. Dans la mouvance de VOYAGE AU BOUT DE L’ENFER (proximité des titres italiens : IL CACCIATORE et L’ULTIMO CACCIATORE, comme le remarquait Ciné-Zine-Zone), HEROS D’APOCALYPSE (pour APOCALYPSE NOW, évidemment) est l’un de ces paradoxes comme en connaît le cinéma populaire. Dénoncer la violence en la montrant, exploiter l’horreur pour son côté spectaculaire tout en la regrettant. Si bien que le spectateur est assis entre deux chaises, partagé entre la jouissance procurée par le film d’action et le dégoût teinté de tristesse craché par le film de guerre.
Ca ne surprendra pas les connaisseurs du cinéma de Margheriti, mais la réalisation est ultra-efficace et en donne vraiment pour son argent au spectateur. Comme souvent on retrouve son casting favori. Luciano Piggozi/Alan Collins et sa tête incroyable, mais surtout John Steiner, génial dans le rôle d’un officier à la froideur effrayante, peut-être fou (le jeu qu’il impose à l’un de ses hommes : courir voler un fruit sous les balles ennemies !). Steiner fut l’un des grands méchants du bis italien d’alors. Le héros, lui, est incarné par le tout aussi excellent David Warbeck, dans un registre différent. Amusant qu’on ait choisi deux Britanniques pour jouer des Américains ! Pour mémoire, Warbeck, inoubliable acteur de L’AU-DELA, faillit bien succéder à Roger Moore dans le rôle de 007. Il avait tout à fait le physique de l’emploi, tendance Sean Connery. Rassurons les sceptiques qui douteraient à tort des capacités d’un acteur de série B à reprendre le rôle de Bond : son interprètation de super-voleur dans LE TEMPLE DU DIEU SOLEIL, du même Margheriti, ne laisse aucun doute sur sa classe naturelle !
Les scènes fortes abondent, comme lorsqu’un soldat à la jambe arrachée se fait mitrailler sur un bateau à la dérive ou, au début, lorsque l’ami du héros descend un camarade avant de se tirer une balle dans la tête. La violence entraîne ici l’émotion. C’est forcément là qu’elle est la plus intéressante.
La fin réserve un joli de coup de théatre qui se rapporte à un flash-back précédent (prouvant s’il en était besoin que Dardano Sacchetti est un bon scénariste). Enfin, les toutes dernières images sont d’une réelle beauté tragique.
Pas de doute, la guerre est une garce.


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- Article rédigé par : Patryck Ficini

- Ses films préférés : Django, Keoma, Goldfinger, Frayeurs, L’Au-delà

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