Un texte signé Jocelyn Manchec

USA - 1977 - Stuart Hagmann
Titres alternatifs : Tarantulas: The Deadly Cargo
Interprètes : Claude Akins, Pat Hingle, Tom Atkins, Deborah Winters, Charles Frank

retrospective

Tarantulas: Le Cargo de la Mort

L’épouvante animalière dépend principalement de trois courants, parfois combinés mais pas toujours, que sont le gigantisme (ou plus vastement la mutation), la délocalisation (un prédateur amené dans un nouveau contexte, peu préparé à sa présence) et le surnuméraire (indispensable pour soutenir le principe invasif !). Il en va surtout de ce dernier lorsque l’on traite des insectes (exception faite de la SF 50’s, le cauchemar atomique ayant plutôt joué la carte de la croissance aussi soudaine que terrifiante, telle qu’on la retrouve dans THEM ! (Gordon Douglas, 1954), TARANTULA (Jack Arnold, 1955)).
La SF accompagnant souvent les angoisses d’une époque, les horribles années 70 se parent donc volontiers de préoccupations écologiques, voire politico-écologiques.

Un avion-cargo en provenance d’Amérique du sud, transportant une importante cargaison de café frelaté, se crashe dans une orangeraie de Californie. Les sacs de café sont infestés de tarentules extrêmement venimeuses, qui vont se répandre dans toute la région. Semant la mort et la terreur sur leur passage, les redoutables araignées envahissent la ville toute proche.

Le fort modeste TARANTULAS – LE CARGO DE LA MORT, modeste surtout dans sa forme et ses tonalités spectaculairement télévisuelles (casting, montage, musique, mais aussi réalisation puisque Stuart Hagmann fut un metteur en boîte récurrent des séries MISSION:IMPOSSIBLE et MANNIX) est ainsi bien en phase avec son temps en évoquant, par exemple, lors de ce qui ne constitue que le prologue du film (!), l’inconséquence de petits escrocs américains important du café équatorien, vraisemblablement impropre à la consommation, sans aucune autorisation ni contrôle sanitaire face à des autorités locales corrompues jusqu’à la moelle (le bras de fer d’exactions pour que chacune des parties arrive à ses fins est d’un remarquable cynisme !).
Les intérêts financiers d’un grand exploitant d’orangeraies retarderont plus tard le travail des héros tentant de sauver les leurs (mais la lutte est déjà plus molle : le patron n’est pas vraiment l’odieux bougre de patron de service (c’est même un farouche partisan anti-pesticide et il fête ses ventes avec ses ouvriers les plus moustachus)).

Les péripéties sont davantage le fait d’une petite et arythmique vendetta adultère locale (et encore…) mais surtout de la légèreté générale avec laquelle est prise le problème (voir le ridicule accident de moto). On sanglotera ainsi bien une minute lorsqu’un proche trépassera (dont un enfant !!) mais personne ne s’affole jamais vraiment. Surtout on lave son linge arachnéen en famille (pas d’intervention de fédéraux, de militaires, de médecins un peu plus capé que le vieux généraliste ventripotent… aucune autorité !) ! Et lorsqu’on fait appel à un « spécialiste » (un improbable toxicologue amateur d’araignées qui ne se lèvera jamais de sa chaise), il semble ne pas quitter son domicile, loin de toute institution, et n’assoit sa compétence que par l’emploi fugace de latin et le port démonstratif de cravate.

On imagine bien que les limites de l’affaire sont, entre autres et outre le talent le plus élémentaire, surtout budgétaires tant nombre de ramifications semblent amorcées lors de la présentation de la petite bourgade « orangicole », avec son improbable école « amatrice » pour enfants autistes, ses notables plénipotentiaires (politiques et marchands), …, pour être vraisemblablement sacrifiées (d’énormes erreurs de continuité exacerbant d’ailleurs cette durable impression).
Mais on conservera également à l’esprit que l’ambition et la multiplicité des trames, en la matière, ne se montrent pas toujours payantes: se souvenir ainsi du pénible et boursouflé L’INEVITABLE CATASTROPHE (Irwin Allen, 1978) suffira à nous le rappeler.

Toutefois, si le titre commandé par la CBS aux productions Alan Landberg se montre en phase avec l’éthique et le mood ambiants, comme évoqué plus haut, il se montre bien sûr surtout au diapason commercial du moment, qui verra fleurir en quelques mois diverses invasions (LES ABEILLES FEROCES, de Bruce Geller (1976), LES FOURMIS, de Robert Scheerer (1977) et L’HORRIBLE INVASION de John « Bud » Cardos (1977)).

Reste que cette contribution, frappée au coin d’une relative rigueur entomologique (parfois didactique mais occasionnant des grands moments d’un dramatique inédit, sinon positivement décalé (le climax de l’amplification du bruit des guêpes !!)) mais bridée par des impératifs grand public induisant une tiédeur certaine (dans sa seconde partie, vraiment mal négociée, et son final « pétard mouillé »), se voit paradoxalement sans grand déplaisir (ni amusement condescendant), peut-être pour sa chaleureuse distribution, volontiers étonnante et bigarrée (les vieillissants Claude Akins (régulier second couteau chez Siegel, Dmytryk, Zinneman ou Hawks, sombrant en télévision les 70’s venues) et Pat Hingle (autre transfuge cinéphile ayant donné la réplique à Marlon Brando, Clint Eastwood, Warren Beatty et… le BATMAN de Tim Burton) ainsi que le jeune Matthew Laborteaux (l’Albert Quinn Ingalls de LA PETITE MAISON DANS LA PRAIRIE) et le « genreux » Tom Atkins (habitué de John Carpenter).


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- Article rédigé par : Jocelyn Manchec

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