Le cri du hibou

Clippeur confirmé pour de nombreux groupes de rock et pop anglais, Jamie Thraves passe discrètement à la mise en scène de long-métrage en l’an 2000 avec THE LOW DOWN avant de repartir dans les vidéos musicales. Ce n’est qu’en 2008 qu’il revient sur un plateau de long-métrage avec ce CRI DU HIBOU pour lequel il s’est entouré de Julias Stiles (vue dans la trilogie Jason Bourne) et Paddy Considine (HOT FUZZ, LA VENGEANCE DANS LA PEAU).
Fuyant un divorce peu glorieux et une insupportable ex-femme, Robert Forrester, ingénieur dans l’aéronautique, s’installe dans une petite ville. Un soir, alors qu’il rentre chez lui en voiture à travers une forêt, il aperçoit une jeune femme, Jenny, seule chez elle. Peu à peu, Robert va prendre l’habitude de l’épier, véritable dérivatif à sa solitude. Mais lorsqu’elle le surprend, sa vie va basculer pour toujours.
Brillamment adapté en 1987 par Claude Chabrol avec Christophe Malavoy et Mathilda May dans les rôles principaux, LE CRI DU HIBOU est d’abord un roman de Patricia Highsmith paru en 1962. Auteur des remarqués INCONNU DU NORD EXPRESS (son premier roman, adapté trois fois dont la première par Alfred Hitchcock) et du TALENTUEUX MR RIPLEY (d’abord adapté par René Clément avec Alain Delon en 1960 puis par Anthony Minghella avec Matt Damon en 1999), la romancière américaine Patricia Highsmith fait sensation avec son septième roman, un thriller psychologique à la fois tortueux et intense. L’adapter une nouvelle fois à l’heure actuelle, c’est faire le pari d’intéresser le spectateur en faisant reposer le suspens uniquement sur l’évolution psychologique des personnages au détriment de tous rebondissements nerveux et autres séquences musclés. En collant au plus près du roman tout en lui apportant une touche moderne par de nombreux détails d’ambiance, le réalisateur livre un film tendu et inattendu pour ceux qui ne connaissent pas l’histoire et un beau travail d’adaptation pour les autres. Envoutant par sa lenteur et la richesse de la psyché des personnages principaux, le récit emmène avec le lui spectateur dans son tourbillon trouble dont nul ne ressort indemne. Naviguant entre fantasmes et machination, la narration piège tous ceux qui prennent part au drame. Si la réalisation sait se montrer d’une efficace sobriété en restant toujours à une certaine distance pudique des personnages, les comédiens sont tous habités par leurs rôles, chacun offrant l’une des meilleures compositions de sa carrière. Sombre et amusant, le film déroule la trame d’un conflit existentiel doublé d’une histoire d’amour compliquée que ne renierait pas les pages faits divers de la plupart des quotidiens.