Halloween 3 : Le Sang du Sorcier

Un texte signé Julien Serrano

USA - 1982 - Tommy Lee Wallace
Titres alternatifs : Halloween 3 : Season of the Witch
Interprètes : Tom Atkins,Stacey Nelkin,Dan O'Herlihy,Michael Currie,Ralph Strait,Jadeen Barbor...

Halloween la Nuit des Masques sorti en 1978, et réalisé par John Carpenter, marque le début d’une longue franchise centrée sur l’un des psychopathes les plus iconiques du slasher US : Michael Myers. A l’origine de sa création : le couple Carpenter/Debra Hill qui a écrit le scénario. Le film est un grand succès commercial, qui engendre une suite HALLOWEEN 2 (1981) réalisé par Rick Rosenthal. Big John et Debra Hill sont sollicités pour l’écriture de cette séquelle. Moins inspirés que sur le premier opus et aussi par envie de changer de registre, ils rédigent un scénario censé en finir avec l’histoire de Michael Myers et donc clôturer la série. Le succès est encore au rendez-vous. Sous l’impulsion des producteurs qui veulent continuer à profiter du succès des films et en faire une franchise, John Carpenter et Debra Hill vont accepter de se remettre au travail pour un troisième volet, mais cette fois ils posent leurs conditions : abandonner définitivement tous les personnages des précédents épisodes : Michael Myers, le Docteur Loomis et Laurie Strode, pour un changement radical d’histoire tout en conservant le thème de la fête d’Halloween. L’objectif est de créer une anthologie sur le principe de TWILIGHT ZONE, avec un film horrifique qui sortirait chaque année pour Halloween. La réalisation est confiée à Tommy Lee Wallace (VAMPIRE VOUS AVEZ DIT VAMPIRE? 2), un fidèle de l’équipe Carpenter qui a déjà oeuvré sur FOG et HALLOWEEN en tant que monteur. Pour écrire le scénario de HALLOWEEN 3, Carpenter fait appel à son idole le scénariste britannique Nigel Kneale, créateur de la série télévisée de science fiction QUATERMASS très populaire sur la BBC dans les années 50. Carpenter et Wallace vont modifier quelques éléments de ce script, et ainsi obtenir un audacieux scénario mixant folklore celtique, technologie, horreur et fantastique.

Dès le début du film, l’atmosphère sombre et menaçante est posée. Comme indiqué en voix off, l’action débute un 23 octobre, à quelques jours de la fête d’Halloween. En pleine nuit, un homme court désespérément pour tenter d’échapper à deux mystérieux poursuivants qui veulent l’éliminer. Après s’être débarrassé de l’un d’eux, il parvient à trouver refuge dans une station-service et s’écroule au sol exténué de fatigue, tout en serrant contre lui un masque d’Halloween. L’employé de la station le transporte immédiatement à l’hôpital où il est pris en charge par le Docteur Challis, interprété par Tom Atkins, un habitué des productions Carpenter (FOG, NEW YORK 1997) Malheureusement, le pauvre homme est brutalement assassiné dans sa chambre d’hôpital. Son mystérieux assassin se suicide peu après en s’immolant dans sa voiture qui explose devant l’hôpital. Très vite, le Docteur Challis, qui a l’habitude de boire après le service pour oublier ses soucis, fait la connaissance de la jolie Ellie Grimbridge (Stacey Nelkin), fille de la victime. Elle lui apprend que son père Harry Grimbridge tenait une boutique de jouets et s’approvisionnait chez Silver Shamrock, une usine de renommée mondiale spécialisée dans la confection de masques d’Halloween. Décidés à élucider les circonstances du meurtre de Harry Grimbridge, nos deux futurs tourtereaux décident de mener l’enquête et partent pour Santa Mira, une petite localité paumée et peu hospitalière. C’est là que se situe la compagnie Silver Shamrock dirigée par le mystérieux Conal Cochrane, irlandais d’origine particulièrement attaché à ses origines celtiques. Pour mener à bien ses affaires, il peut compter sur ses sbires peu expressifs (en réalité des robots) qui se chargent de liquider froidement toute personne qui s’intéresserait d’un peu trop près aux «secrets» de fabrication Silver Shamrock. Dans le rôle de Cochrane, on reconnaitra le vétéran Dan O’ Herlihy, bien connu pour son rôle du dirigeant de l’OCB dans ROBOCOP et ROBOCOP 2.

Malgré son apparence d’homme respectable, Cochrane est un personnage maléfique, dont le projet est de répandre la mort dans toutes les familles américaines. Il souhaite ainsi perpétuer la tradition des sacrifices rituels pratiqués durant la fête celtique ancestrale de Samhain. Pour mener à bien ce projet meurtrier à grande échelle qui sera mis à exécution le soir d’Halloween, Cochrane «le sorcier» a fait de son usine Silver Shamrock un site inquiétant, où se déroulent des expériences utilisant la technologie et le surnaturel : pierre de Stonehenge au pouvoir destructeur, masques d’ Halloween équipés d’une puce électronique meurtrière et spot publicitaire diffusé constamment sur

les écrans TV, dont le jingle hypnotique provoque une mort atroce. HALLOWEEN 3 LE SANG DU SORCIER contient tous les ingrédients d’un bon petit film des années 80 mélangeant horreur et fantastique. Fidèle au style Carpenter, le film joue sur des ambiances oppressantes et menaçantes à souhait, accentuées par une musique électronique froide, minimaliste et répétitive, signée Carpenter et Alan Howarth. On pense bien sûr aux deux premiers HALLOWEEN, mais aussi à FOG et THE THING. Le score, entre rythmique électronique entêtante et nappes synthétiques sourdes et lancinantes, est un des points forts du film. Certains effets sonores font monter la tension, comme ce son strident quand un personnage potentiellement dangereux apparaît. Tommy Lee Wallace, en bon élève qu’il est, intégre parfaitement les techniques visuelles du maestro Carpenter quand il s’agit d’instaurer un climat anxiogène. L’ utilisation maitrisée du format scope, notamment sur les plans large en extérieurs, qu’ils soient fixes ou avec de lents mouvements de caméra, permet d’imprégner cette atmosphère inquiétante. On pense notamment au moment où Challis et Ellie arrivent à Santa Mira, semblable à une ville fantôme. Dean Cundey, un autre fidèle de Carpenter qui a travaillé sur les précédents HALLOWEEN, s’occupe de la photo. Il en résulte un visuel esthétique et soigné qui rappelle les deux premiers opus. Instaurant une ambiance sombre et inquiétante avec des séquences flirtant parfois avec le fantastique et l’horreur, HALLOWEEN 3 nous gratifie de quelques scènes horrifiques, parfois sanglantes, particulièrement efficaces. On se souviendra plus particulièrement du moment où Cochrane procède à une démonstration de son projet de mort en utilisant le gamin de la famille Kopfer comme cobaye. Après avoir visionné le fameux spot publicitaire Silver Shamrock, la tête du gamin se déforme sous son masque jusqu’à ce que des serpents et des dizaines d’insectes grouillants sortent de sa bouche pour se répandre partout. Avec cette scène répugnante mettant en scène la mort d’un enfant, HALLOWEEN 3 montre aussi son côté transgressif propre aux films d’horreur des années 80. Il arrive aussi que certains masques Silver Shamrock comportent des défauts de fabrication. Leur pouvoir meurtrier peut alors se déclencher accidentellement. Marge Guttman en fait la douloureuse expérience lorsqu’elle meurt atrocement défigurée. Là aussi, les effets spéciaux sont plutôt réussis. On appréciera également ce moment où un pauvre bougre, qui a osé dire tout le mal qu’il pensait du business Silver Shamrock, se fait carrément arracher la tête à mains nues par les hommes de main de Cochrane. Une scène gore très réussie. Malgré quelques incohérences scénaristiques, le film ne perd pas de temps en scènes inutiles, et propose une intrigue simple qui fait progressivement monter la tension jusqu’au terrible final. Dans HALLOWEEN 3, on retrouve un thème présent dans les films de Carpenter : la contamination. Ici, c’est le medium télévisuel présent partout qui est utilisé comme support pour diffuser un signal maléfique destiné à tuer comme un virus mortel. C’est aussi une critique des mass media et de leur pouvoir d’aliénation, qu’on retrouve dans INVASION LOS ANGELES. On pense aussi à VIDEODROME de David Cronenberg. Considéré comme un ovni de la franchise HALLOWEEN, le film de Tommy Lee Wallace subit un échec commercial à sa sortie en 1982. L’absence de Michael Myers déçoit le public de l’époque, élevé aux slashers US comme VENDREDI 13. De nos jours, HALLOWEEN 3 semble reprendre à juste titre la place qu’il mérite parmi les aficionados du genre. Son ambiance particulièrement sombre et angoissante, son intrigue originale et son esthétique soignée en font un film de genre au charme indéniable qui ravira les amateurs.


Votre soif de lecture n'est pas rassasiée ?
Téléchargez les anciens numéros de Sueurs Froides


Inscrivez-vous à la liste de diffusion et accédez au
téléchargement des anciens numéros de Sueurs Froides :
- Une tranche d'histoire du fanzinat français
- 36 numéros de 1994 à 2010
- Près de 1800 films critiqués
Un index est disponible pour chercher un film ou un dossier
CLIQUEZ ICI.

- Article rédigé par : Julien Serrano

- Ses films préférés :


=> Pour prolonger votre lecture, nous vous proposons ce lien.
Share via
Copy link